La pub qui murmurait à l'oreille des consos

Un son vaudrait-il mille images ? On peut se poser la question, devant l’engouement des marques, ces derniers mois, pour les campagnes qui font la part belle à la création sonore.

Il y a bien sûr l’ASMR, cette sensation agréable difficile à décrire déclenchée par des chuchotements, tapotements et autres sons feutrés, une sorte d’ « orgasme cérébral » qui place les auditeurs dans un état de détente et de bien-être uniques en leur faisant écouter des sons de brossage de cheveux ou de mastication.
Hermès et Ikea ont récemment contribué à la diffusion du phénomène avec leurs campagnes, tout en injectant dans celles-ci une dimension sensorielle complètement nouvelle. Le son apporte un relief inédit à l’image et une présence formidable au produit ; il donne presque l’impression de pouvoir sentir le parfum et de pouvoir toucher les objets. 
Cet effet de synesthésie, exploité de manière littérale par la marque Norrlands Guld Ljus qui propose de « la bière à boire avec les oreilles », est intéressant dans la mesure où il propose un contrepoint efficace et bien vu à la culture du tout-image.    

Certes les écrans sont partout et nous sollicitons notre vue plus que n’importe quel autre sens – et ce, avec ou sans Instagram ! – mais les formats sonores connaissent un succès grandissant

Selon une étude publiée par Nielsen88% des consommateurs issus de la Generation Z et 93% des Millennials écoutent la radio (ni sur internet, ni via satellite, « la bonne vieille radio » AM/FM, précise l’étude). Le succès des podcasts etde l’audio on demand, aussi bien en France qu’au niveau mondial, notamment aux Etats-Unis (+62,4% sur un an), se situe dans cette même tendance. 
Dans un environnement saturé d’images, le son conserve une force sensorielle et une dimension intime qui n’existent plus vraiment dans l’image. Que l’on pense aux bains sonores thérapeutiques, aux podcasts qui invitent des inconnus à raconter leur vie au creux de notre oreille ou aux expériences auditives comme CALLS : toutes ces créations fondées sur le son se distinguent par une proximité et une chaleur qui ont déserté depuis longtemps les fils Facebook et Instagram. 
Avec en bonus, la possibilité de créer ses propres images mentales, d’imaginer ses décors et le visage de celui ou celle qui parle : on se souvient du refus de Vincent Lindon de se laisser filmer à la radio « au nom du fantasme ».

Il y a dans le son, et plus encore dans la voix, une part d’humanité qui tient au souffle, aux vibrations qu’un support visuel figé ne peut ni contenir ni véhiculer. 
Au-delà de l’immédiateté que la voix permet, c’est évidemment cette part d’humanité que les assistants personnels comme Alexa – qui est désormais capable de chuchoter - cherchent à reproduire. 
Un subtil mélange de vibrations, de silences et d’imagination qui va au-delà de l’onde sonore seule, comme l’illustre merveilleusement le travail de l’artiste Sofia Mattioli sur la musique de Jamie XX – à voir, revoir, écouter, réécouter pour le plaisir. 
         

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